[Chronique d'une grosse 4] Grosse et malade chronique, la déchéance
Si on ajoutait un peu de validisme à notre grossophobie pour varier un peu les plaisirs ?
Tous les mois je vous parle grossophobie dans ma série Chronique d’une grosse. La série est réservée aux abonné·es premium.
Ca fait des années que je dis, et je ne suis sûrement pas la seule, que la grossophobie est une oppression qui se trouve sous l’ombrelle du validisme. On retrouve énormément de points communs entre l’oppression systémique des personnes grosses et l’oppression systémique des personnes handicapées : on retrouve des arguments, on retrouve le même jugement/dégoût pour le corps de ces personnes, on retrouve la même infantilisation, la même idée qu’on sait mieux que ces personnes ce qui est bon pour elles…
Avant d’être handicapée1 quand je discutais avec des personnes qui subissaient du validisme, tout ça me semblait très proche de ce que je subissais avec la grossophobie, assez pour me convaincre que ces oppressions ont les mêmes racines.
En effet, un des arguments principaux des grossophobes quand iels harcèlent les gros·ses, parfois de façon dite bienveillante, parfois de façon ouvertement hostile, est la santé. Je ne compte plus le nombre de fois qu’on m’a dit que j’étais en train de détruire ma santé en refusant de perdre du poids2. Je serais incapable de vous raconter toutes les fois où les gens m’ont dit que j’allais mourir, très bientôt, parce que je ne faisais pas assez d’effort pour maigrir. J’attends avec impatience mes 40 ans, parce qu’on me promet depuis mes 20 ans que je ne les verrai pas… Mais je sais aussi qu’à 40 ans on me dira que je ne verrai pas mes 50 ans (le tout sans aucun fondement scientifique, bien sûr).
Cette sacro-sainte santé qu’on m’a agitée sous le nez toute ma vie, dès que j’ai commencé à prendre du poids, avant même que je commence à en prendre en fait, est une obsession de notre société. On vend à peu près tout et n’importe quoi pour être “healthy” (c’est encore mieux si on utilise l’anglais), de la crème quantique aux compléments alimentaires sans fin. Mais il y a une violence particulière destinée aux personnes qui ne font pas absolument tout ce qu’elles peuvent pour rentrer dans la jolie petite case qu’on considère comme “en bonne santé” (et qui n’a aucun sens scientifique).
Très tôt j’ai compris qu’en tant que femme grosse je n’avais le droit d’exister que si 1) je faisais absolument tout ce que je pouvais pour perdre du poids (on pouvait m’excuser le fait de ne pas réussir, mais il fallait que je me tue à la tâche) 2) si j’étais en bonne santé. Et pour ça, on visait des choses très spécifiques qu’on considère comme liées au poids : le diabète, la tension, le cholestérol, les problèmes de genoux… Toutes ces choses qu’on promet aux grosses et aux gros. Et pendant des années, je n’avais aucun de ces problèmes, et c’était devenu pour moi un vrai moyen de défense que d’utiliser cette “bonne santé” comme un bouclier contre les attaques grossophobes… Jusqu’au jour où je n’ai plus pu.
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